Aller au contenu principal
Intérieur de la cathédrale d'Arras en ruines, en 1916

Intérieur de la cathédrale d'Arras en ruines, en 1916

Arras

Arras

Intérieur de la cathédrale d'Arras en ruines, en 1916

Intérieur de la cathédrale d'Arras en ruines, en 1916

Auteur : SABATTE Fernand

Lieu de conservation : musée d’Orsay (Paris)
site web

Date de création : 1916

Date représentée : 1916

H. : 168 cm

L. : 137 cm

Huile sur toile.

Domaine : Peintures

© GrandPalaisRmn (musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski

Lien vers l'image

INV 20734 - 00-002745

La fascination des ruines : Arras dans la Grande Guerre

Date de publication : Janvier 2011

Auteur : Alexandre SUMPF

La Grande Guerre à Arras

Avant la guerre, la ville d’Arras, chef-lieu du Pas-de-Calais, attirait déjà les touristes avec les deux places baroques qui en font l’égale de Lille ou de Bruxelles. Les combats de la Grande Guerre atteignent la cité dès le mois d’août 1914 ; le 7 octobre, l’hôtel de ville est en flammes, le 6 juillet 1915, la cathédrale est touchée. Jusqu’en avril 1917, le front s’établit à la lisière de la ville qui ne vit plus que sous les bombes : tout comme Reims, Arras est considérée comme une « ville martyre ».

Les artistes ayant réalisé les œuvres commentées ici ont tous deux une expérience de guerre, différente il est vrai. Fernand Sabatté (1874-1940), élève des Beaux-Arts et apprenti dans l’atelier de Gustave Moreau, se trouve mobilisé et même décoré pendant la Première Guerre mondiale, au cours de laquelle il trouve le temps de peindre les spectacles de désolation qu’il découvre. Georges (dit Geo) Dorival (1879-1968), fameux dès 1910 pour ses affiches publicitaires, en particulier touristiques, est lui réformé mais s’engage comme infirmier volontaire à l’hôpital militaire du Val-de-Grâce. Il continue à dessiner des affiches (pour la Croix-Rouge par exemple) et des cartes postales de bienfaisance.

Esthétique de la destruction

Le tableau de Fernand Sabatté est peint dans les tons assez pâles de la pierre crayeuse qui a servi à édifier la cathédrale d’Arras. La composition est rythmée verticalement par des colonnes encore debout, disposées selon une fausse perspective. Le socle de la colonne la plus proche sert de repère horizontal et trace une limite entre la partie de l’édifice restée intacte et les décombres qui gisent au sol jusqu’au premier plan. Derrière le monceau de gravats apparaissent la chaire au dais à demi effondré et un confessionnal aux rideaux d’un jaune éteint, seule touche de couleur dans ce monde de ruines qu’habille une fine poussière.

L’affiche réalisée par Geo Dorival est plus impressionnante encore. La ville d’Arras, cité d’art et de culture, y est résumée par les ruines de ses plus célèbres édifices. Vus avec peu de recul et traités avec une palette qui associe les bruns sourds et les gris lugubres, ils semblent devoir s’enfoncer dans le bas de l’image. Au centre se dressent les vestiges de l’hôtel de ville, bien reconnaissable à son beffroi. À droite, les étais de bois disent l’instabilité des façades restées en place. Dans le ciel crépusculaire flottent des nuages dont la forme rappelle la fumée des bombes et des incendies qui ont ravagé la ville. Le dessin écrase littéralement la partie de l’affiche où le nom de la ville apparaît en réserve sur un fond rouge sang, couleur reprise pour le liseré qui le borde. Le point de vue adopté donne le sentiment d’un vide que rien ne peut combler : fenêtres sans carreaux, monuments sans toits, rues sans âme qui vive. Dessinés en peu de traits, les amas de décombres montrent le travail herculéen à accomplir pour rendre à Arras son visage.

Souvenirs d’une épreuve passée

Le tableau de Sabatté et l’affiche de Geo Dorival constituent chacun une sorte d’instantané destiné à montrer l’ampleur des dégâts que la guerre a infligés à des monuments de la culture européenne. L’accablement saisit le spectateur à la vue de ces lieux dévastés, dont aucun homme ne vient troubler le silence. Mais l’affiche de Dorival fait des ruines un attrait touristique, une invitation à visiter la ville : deux ans après la fin du conflit, Arras ne peut proposer qu’un tourisme de nature mémorielle pour trouver les fonds indispensables à sa renaissance. Le centre historique d’Arras est longuement reconstruit à l’identique dans les années 1920 et 1930 sous la direction de l’inspecteur général des Monuments historiques Pierre Paquet, tandis que les faubourgs bénéficient d’une vaste opération urbanistique et de l’érection de bâtiments dans le style Art nouveau.

Annette BECKER, Les Cicatrices rouges. France et Belgique occupées, Paris, Fayard, 2010.

Éric BUSSIÈRE, Patrice MARCILLOUX et Denis VARASCHIN (éd.), actes du colloque « La grande reconstruction : reconstruire le Pas-de-Calais après la Grande Guerre », 8-10 novembre 2000, Arras, Archives départementales du Pas-de-Calais, 2002.

Nathalie PÉGÉ-DÉFENDI, Une invitation au tourisme : l’affiche ferroviaire française, 1880-1936, thèse, université Paris I, 2001.

Alexandre SUMPF, « La fascination des ruines : Arras dans la Grande Guerre », Histoire par l'image [en ligne], consulté le 20/05/2024. URL : histoire-image.org/etudes/fascination-ruines-arras-grande-guerre

Anonyme (non vérifié)

j'aimerai savoir où se trouve actuellement le tableau du peintre Fernand Sabatté:"intérieur de la cathédrale d'Arras en ruines".Est-ce qu'on peut le voir?
J'ai un devoir à faire sur ce sujet la cathédrale d'Arras pendant la guerre 14-18 merci de me répondre

lun 28/04/2014 - 20:13 Permalien

Ajouter un commentaire

HTML restreint

  • Balises HTML autorisées : <a href hreflang> <em> <strong> <cite> <blockquote cite> <code> <ul type> <ol start type> <li> <dl> <dt> <dd> <h2 id> <h3 id> <h4 id> <h5 id> <h6 id>
  • Les lignes et les paragraphes vont à la ligne automatiquement.
  • Les adresses de pages web et les adresses courriel se transforment en liens automatiquement.
CAPTCHA
Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

Mentions d’information prioritaires RGPD

Vos données sont sont destinées à la RmnGP, qui en est le responsable de traitement. Elles sont recueillies pour traiter votre demande. Les données obligatoires vous sont signalées sur le formulaire par astérisque. L’accès aux données est strictement limité aux collaborateurs de la RmnGP en charge du traitement de votre demande. Conformément au Règlement européen n°2016/679/UE du 27 avril 2016 sur la protection des données personnelles et à la loi « informatique et libertés » du 6 janvier 1978 modifiée, vous bénéficiez d’un droit d’accès, de rectification, d’effacement, de portabilité et de limitation du traitement des donnés vous concernant ainsi que du droit de communiquer des directives sur le sort de vos données après votre mort. Vous avez également la possibilité de vous opposer au traitement des données vous concernant. Vous pouvez, exercer vos droits en contactant notre Délégué à la protection des données (DPO) au moyen de notre formulaire en ligne ( https://www.grandpalais.fr/fr/form/rgpd) ou par e-mail à l’adresse suivante : dpo@rmngp.fr. Pour en savoir plus, nous vous invitons à consulter notre politique de protection des données disponible ici en copiant et en collant ce lien : https://www.grandpalais.fr/fr/politique-de-protection-des-donnees-caractere-personnel

Partager sur

Découvrez nos études

Les débuts de l'aviation : Nungesser et Coli

Les débuts de l'aviation : Nungesser et Coli

Traverser les mers fut une constante dans l’esprit des premiers aviateurs. Blériot franchit la Manche en 1909, Garros la Méditerranée en 1913. Il…

La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »

La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »

La guerre des artistes et des éditeurs

La production iconographique explose lors de la Grande Guerre : le public, abreuvé de photographies et de…

La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »
La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »
La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »
La force d’un mythe : les « atrocités allemandes »
L’attentat de Sarajevo

L’attentat de Sarajevo

Un retentissement international

Survenu dans un contexte international tendu entre les grandes puissances européennes, l’assassinat de l’archiduc…

L’attentat de Sarajevo
L’attentat de Sarajevo
Ronald Hoskier, une légende de l'Escadrille Lafayette

Ronald Hoskier, une légende de l'Escadrille Lafayette

L’escadrille La Fayette à l’heure de l’entrée en guerre officielle des États-Unis, symbole et modèle à suivre

Créée le 20 avril 1916, l’…

Ronald Hoskier, une légende de l'Escadrille Lafayette
Ronald Hoskier, une légende de l'Escadrille Lafayette
I Want You for U.S. Army

I Want You for U.S. Army

1917, tournant de la Grande Guerre

Paru en juillet 1916, le dessin I Want You for U.S. Army est recyclé en affiche et largement diffusé pendant…

La guerre juste

La guerre juste

Le choc des cultures

Dans une nation moins déchristianisée que la France, où la foi ne constitue pas le principe de ralliement d’un parti (comme…

La guerre juste
La guerre juste
La guerre juste
L'engagement des artistes dans la Grande Guerre

L'engagement des artistes dans la Grande Guerre

Les Bretons dans la guerre

En Bretagne, les pertes humaines de la Grande Guerre semblent avoir été plus lourdes que dans le reste du territoire.…

L'engagement des artistes dans la Grande Guerre
L'engagement des artistes dans la Grande Guerre
L'engagement des artistes dans la Grande Guerre
Dessiner la mort pendant la guerre de 1914-1918

Dessiner la mort pendant la guerre de 1914-1918

Les conditions nouvelles de la guerre infligent des violences innombrables et terribles aux soldats. Le champ de bataille est un immense charnier…

Dessiner la mort pendant la guerre de 1914-1918
Dessiner la mort pendant la guerre de 1914-1918
Les Bretons dans la guerre de 1914-1918

Les Bretons dans la guerre de 1914-1918

Les Bretons dans la guerre

Le nombre des Bretons tués au cours de la Grande Guerre est estimé à 130 000, ce qui représente un pourcentage de…

La permanence de l'imagerie de la Grande Guerre dans les affiches politiques

La permanence de l'imagerie de la Grande Guerre dans les affiches politiques

La IIIe République, fondée en 1870, est sortie victorieuse de la Grande Guerre. Ce combat de quatre années continue pourtant de marquer…

La permanence de l'imagerie de la Grande Guerre dans les affiches politiques
La permanence de l'imagerie de la Grande Guerre dans les affiches politiques